Retail Spot, ce Français qui veut lui aussi concurrencer Criteo et CitrusAd
Nicolas JaimesLongtemps chasse gardée de Criteo, le secteur du retail media ne cesse d’accueillir des “petits nouveaux” bien décidés à marcher sur les plates-bandes de la licorne française. Nous avons largement documenté la montée en puissance d'Unlimitail, alliance entre CitrusAd et Carrefour (qui est client de Criteo jusqu’à la fin de l’année). Nous vous avons également parlé de Kamino Retail, une plateforme qui va permettre aux sites de la Fnac et de Darty (autres clients de Criteo) de diffuser des publicités vidéos shoppables. Et c’est aujourd’hui au tour de Retail Spot, une plateforme retail media aux ambitions aussi élevées que les sociétés précédemment citées, de sortir du bois.
Retail Spot, c’est d’abord l’association de quatre experts de l’adtech. Alexis Leduc, qui a cofondé le trading desk de Mediaperformance, Shopper Factory, pour aider des retailers comme Auchan, Carrefour ou Système U à activer leurs données en extension d’audience. Ainsi que trois anciens de SticlyAds : Joseph Nguyen, le CEO, Guillaume Andouard, le CTO, et Shujan Rasiah, le CSO. Mais Retailspot, c’est aussi un partenariat avec un poids lourd de l’adtech, Equativ, dont l’adserver permet à la plateforme retail media de gérer la diffusion de publicités on-site alors que sa solution de curation, Equativ Buyer Connect, lui permet, elle, de diffuser des publicités en extension d’audience, au sein de l’écosystème Equativ (plusieurs millions de sites médias qui ont intégré les SSP).
A l’instar de Kamino Retail, Retail Spot voit dans le format pub vidéo, qui commence doucement à s’inviter au sein des sites retailers, une bonne porte d’entrée. Mais là où Kamino Retail se concentre exclusivement sur les vidéos shoppables et préempte des emplacements bien spécifiques, Retail Spot préfère, lui, s’adapter à la navigation de l’internaute. “Nous avons imaginé un format vidéo ‘sticky’, qui s’affiche au moment et à l’endroit où le shopper s’arrête son scroll”, précise Alexis Leduc. Pas d’emplacement précis donc… mais un niveau d’attention élevé. Avec, pour le retailer, la possibilité de faire disparaître la vidéo à la fin de la lecture, ce qui permet à la grille produit de l’e-commerçant de reprendre sa forme initiale. Uniquement de l'awareness donc, dans ce cas de figure.
“Notre ambition, c’est d’imaginer des formats qui permettent de reproduire en ligne l’expérience magasin”, explique Alexis Leduc. C’est ainsi que le format “product discovery” s’inspire de la bonne vieille tête de gondole physique, avec des visuels vidéos qui sont générés à partir d’un flux produit et affiché au sein d’une catégorie.“Nous récupérons les visuels produits et les liens de redirection, ce qui élimine pas mal de frictions dans la création de l’annonce publicitaire”, précise Alexis Leduc. La marque peut ensuite négocier une période d’exclusivité sur une catégorie et une période donnée.
Le format vidéo, que Retail Spot est l'un des rares à proposer pour l’instant en France avec Kamino Retail et Trygr, est son produit d’appel. Mais ce n’est pas le seul. On retrouve chez Retail Spot toute la panoplie du retail media : display classique, display natif et search sponsorisé on-site. Et évidemment display en extension d’audience (off site). “Nous ne voulons pas nous cantonner à la vidéo. L’objectif, c’est de s’adapter à la maturité et aux besoins de chaque client”, justifie Alexis Leduc.
De fait, Retail Spot propose trois types d’intégration. Si le retailer est déjà équipé d’un adserver qui gère le display classique (et qu’il en est content), il peut simplement intégrer le player de Retail Spot pour lui ajouter le format vidéo. Retail Spot prend alors un fee CPM sur l’inventaire vendu. Sinon, le retailer peut décider de confier la brique adserving à Equativ et faire, ce faisant, confiance à Retail Spot pour l’ensemble des formats display (classique, natif et vidéo) on et/ou offsite. La plateforme lui facture un fee CPM sur l’inventaire vendu ainsi qu’un frais de licence fixe mensuel. La partie commercialisation et adops est, dans ce cas, gérée par le retailer.
Le dernier modèle, c’est l’offre “managed”. “Nos équipes gèrent la mise en place, le suivi et la commercialisation”, précise Alexis Leduc. Une offre plutôt pensée pour les retailers qui n’ont pas la maturité technologique des leaders du secteur. Plutôt du tiers 2 et du tiers 3. “Ils sont nombreux à ne pas s’être encore mis au retail media”, déclare Alexis Leduc. Le modèle économique est celui d’une régie classique : un partage de revenus (rev share).
S’il est convaincu qu’il y a une place à prendre, “entre ceux qui ont été déçus par Criteo et ceux qui n’iront jamais chez Unlimitail, du fait de son affiliation avec Carrefour”, Alexis Leduc reste pragmatique. “Nous visons les retailers tiers 2 et tiers 3 pour nous déployer le plus vite possible et faire nos preuves”, explique-t-il, tout en précisant qu’il compte bien participer à des appels d’offres tiers 1 et qu’il ne se formalisera pas s’il a besoin d’entrer par la petite porte. “Notre technologie peut s’avérer complémentaire de celle de Criteo et CitrusAd puisque ces deux acteurs ne proposent, à date, pas d’offre vidéo. Cela peut être un bon moyen de faire nos preuves chez un retailer tiers 1 et d’espérer, si on fait bien notre job, de passer à la vitesse supérieure en récupérant tout l’inventaire !”
Vous l’aurez compris, Retail Spot ne manque pas d’ambitions. Ce même s'il ne joue pas dans la même cour qu'Unlimitail et Criteo en matière de moyens financiers. Peut-être parce que la plateforme peut s’appuyer sur des beaux “sponsors”. A commencer par Equativ, dont les ambitions sur le retail media ne sont plus un mystère et qui pourrait être tenté, à terme, de transformer ce partenariat commercial. Equativ, qui équipe par ailleurs l’alliance data du groupe Valiuz, sur la partie extension d’audience. On peut très bien imaginer ce dernier pousser la solution de Retail Spot auprès de ses membres les moins matures par cohérence technologique.
Tout comme on peut aussi penser que Mediaperformances, avec qui Alexis Leduc dit “avoir gardé de très bons contacts”, peut-être tenté de pousser une offre complémentaire de la sienne auprès de certains clients, comme Système U ou Auchan. “Nous sommes complémentaires de leur offre car ils ne font que de l’extension d’audience pour ces deux clients”, estime Alexis Leduc.
Les retailers justement qu’en pensent-ils ? “On sent que la peinture est encore fraîche”, prévient l’un d’entre eux, qui a pu découvrir le projet. Tout en se réjouissant de l’arrivée d’un nouvel acteur, “qui, comme Kamino Retail, permettra sans doute que les appels d’offres retail media ne se réduisent pas à un affrontement entre Unlimitail et Criteo.” “L’émulation permise par l’arrivée de nouveaux acteurs va permettre à ce marché qui ne cesse de grandir de le faire sereinement”, observe un connaisseur du secteur. Retail Spot est, pour l’instant, financé sur fonds propres et s’appuie sur deux sales pour parler aux agences médias. “Nous envisagerons une levée de fonds lorsque nous réussirons à séduire un retailer tiers 1”, prévient un Alexis Leduc qui sait que cela peut prendre du temps. “Même si ce n’est pas impossible d’ici fin 2023”, estime-t-il sans se départir de son ambition.
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