Jenny Rozycki (Cofidis) : "On aimerait que le marché nous propose une roadmap claire sur la fin des cookies tiers et qu’il nous assure que l’on pourra continuer à mesurer la performance de nos campagnes"
Nicolas JaimesMinted. Google vient de défrayer la chronique en annonçant qu’il ne supprimerait finalement pas les cookies tiers de Chrome par défaut, préférant laisser le choix aux utilisateurs. Comment avez-vous accueilli cette annonce ?
Jenny Rozycki. Comme tout annonceur qui travaille avec Google, ce n’a pas forcément été une surprise. Nous nous sommes habitués, au fil des années, à ce qu’ils nous prennent un peu de court, avec des annonces auxquelles nous ne nous attendions pas.
Nous avons donc pris la nouvelle comme elle est arrivée, sans nous en émouvoir plus que cela. D’autant qu’il faut bien avouer que l’effet d’attente, le fait que Google repousse sans cesse l’échéance, devenait pesant pour tout le marché.
Quel a été votre premier réflexe ?
Aller à l’information ! Consulter nos partenaires, tech et régies, pour décortiquer cette annonce. Et réfléchir à l’impact sur la mesurabilité de nos campagnes, qui est tout de même le premier challenge lié à la disparition des cookies tiers.
Ce n’est pas toujours simple pour un annonceur, qui doit en même temps gérer les affaires courantes, de prendre du recul sur ce genre de sujets. Et je comprends que beaucoup de mes homologues se sentent un peu perdus.
Le secteur est tellement mouvant. On n’a pas vraiment d’autre choix que de naviguer à vue. Même si on aimerait que le marché puisse enfin nous proposer une roadmap claire et qu’il nous assure que l’on pourra continuer à mesurer la performance de nos campagnes et faire de l’attribution sans soucis.
Où en êtes-vous, concrètement, sur ce sujet de l’après cookies tiers ?
Chez Cofidis, cela fait plus de quatre ans que nous travaillons sur le sujet. Nous avons démarré les premiers tests en 2020, en nous appuyant sur la solution de ciblage contextuel de Weborama.
Cela fait maintenant deux ans que les campagnes d’acquisition que nous opérons via le trading desk de Weborama sont 100% contextuelles, avec en plus de l’IA et du traitement du langage. Et donc 100% cookie3dless.
Pour quelle raison ?
Pourquoi continuer à utiliser le cookie tiers quand on obtient un meilleur reach, en étant capable de cibler sur Safari et Firefox, et des CPM plus compétitifs, car la concurrence est moindre sur ces environnements impossibles à adresser par ceux qui ne passent que par des cookies tiers ?
Ce qui est vrai pour Weborama est-il vrai pour d’autres acteurs ?
Nous faisons aussi du cookie3less avec d’autres adtech. Pour autant, si l’on regarde l’ensemble de nos budgets médias, le cookie3dless reste marginal. Le cookie tiers reste un passage obligé pour certains de nos partenaires, notamment ceux qui font du retargeting.
Ces partenaires sont parmi ceux qui testent le plus activement la Privacy Sandbox, la suite d’API mise sur pied par Google pour remédier à la disparition des cookies tiers. Vous n’avez donc pas encore pu la tester ?
On aurait aimé mettre un pied dans la Privacy Sandbox et on leur a d’ailleurs posé la question au premier semestre. Mais ils nous ont dit que c’était encore trop tôt, vu qu’eux-mêmes étaient en train de tester la chose pour leur compte.
Vous avez également décidé de tester FirstID. Pour quelle raison ?
Tout simplement pour continuer à orchestrer des campagnes display performantes. L’une des limites du ciblage contextuel, c’est la fréquence d’exposition. Une campagne de ce genre permet de toucher entre 1,5 et 2 fois la même personne.
C’est logique puisqu’on lit rarement plus d’une fois la même page. Le problème c’est qu’on sait qu’il faut entre 7 et 8 impressions par personne pour qu’une campagne d’acquisition soit vraiment performante. C’est là que First ID entre en piste, pour nous aider à recibler les personnes touchées 1 à 2 fois via le contextuel.
Comment ça marche concrètement ?
L’adserver de Weborama collecte les ID des exposés et de ceux qui ont clické. Il transmet ces informations à First ID qui peut ensuite créer des segments à recibler.
Cela permet de s’appuyer sur First ID sans que ce dernier ne dépose de script sur le site de Cofidis, ce qui était inenvisageable pour nous.
L’une des réponses à la fin du cookie tiers, c’est aussi de muscler sa 1st party. Quelles actions ont été entreprises en ce sens ?
Vous savez quand on opère, comme c’est le cas de Cofidis, dans le secteur du crédit bancaire, il y a des lignes rouges. Notre base de clients est un actif que nous protégeons rigoureusement.
Nous n’avons jamais rien envoyé aux plateformes sociales. Nous n’avons jamais fait de CRM display. C’est sûr que c’est contraignant et que c’est parfois compliqué, dans ces conditions, de trouver des partenaires capables d’être efficaces malgré tout. Mais c’est ainsi !
L’un des sujets du moment, c’est la recherche d’une customer data platform (CDP). Nous avons rencontré beaucoup d’acteurs. Comme toujours, dans ces cas-là, il faut partir des “use cases”. Qu’est-ce qu’on veut faire de cette donnée ? Par quoi on veut la compléter ?
On dit souvent que la fin des cookies tiers risque de renforcer le poids des walled gardens dans les budgets des annonceurs. Est-ce un sujet que vous surveillez de près ?
Bien sûr ! Et cela ne nous a pas échappé que les GAFAM obtenaient une part de marché croissante au fil des Observatoires de l’epub.
Cofidis travaille évidemment avec Meta, Google et Youtube. Parce qu’ils ont du reach et de la data. Mais aussi parce qu’ils s’appuient sur une promesse qui est précieuse pour tout annonceur : de la simplicité. C’est facile de monter une campagne sur Meta Ads ou Google Ads. De même que de brancher CAPI de Facebook sur son site.
Mais nous restons vigilants sur ce que ces acteurs nous remontent comme information de performance des campagnes, vu qu’ils sont juges et parties. De même que nous faisons très attention à ce que nous leur donnons comme information. Nous sommes ouverts aux solutions d’optimisations proposées par les GAFAM mais nous serions toujours très attentifs et pointilleux à la méthode de sécurisation des données.
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