David Folgueira (first.id) : “Notre cookie 1st party permet aux éditeurs de retrouver la vue sur une large majorité de leur inventaire pub”
Nicolas JaimesMinted. Vous quittez Prisma Media, dont vous étiez directeur exécutif adjoint de la régie, pour lancer first.id. En quoi consiste ce projet ?
David Folgueira. Mon rôle au sein de la régie du groupe Prisma Media m’a permis de tester l’essentiel des solutions d’identification au cours de ces trois dernières années. Le constat est simple : aucune d’entre elles n’est, à ce stade, concluante. Les solutions existantes sont très complexes à mettre en place car il faut réussir à embarquer les agences, les SSP et mettre en place les connexions. Elles n’ont en outre que très peu de reach puisqu’elles dépassent rarement les 20% d’utilisateurs identifiés.
"Les revenus des éditeurs ont chuté de 50% au sein de Firefox et Safari à cause de la disparition des cookies tiers"
Tout cela est très problématique car la disparition des cookies tiers est un sujet d’aujourd’hui. Oui, Google a décalé leur disparition de Chrome à 2024 mais c’est tout sauf une bonne nouvelle. Parce que cela va sans doute en inciter certains à remettre le sujet du cookieless sous la pile alors même que c’est déjà 40% de l’inventaire d’un éditeur, soit la part de marché de Firefox et Safari, qui est devenu très difficile à monétiser parce que les cookies tiers sont bloqués par ces navigateurs. Le résultat, c’est une chute des revenus de l’ordre de 50% au sein de ces environnements. Ce qui est évidemment énorme.
Et vous voulez y remédier…
C’est exactement l’ambition de first.id. De quoi parle-t-on ? D’une solution basée sur le cookie first party qui permet aux éditeurs de retrouver la vue sur une large majorité de leur inventaire. first.id leur permet de créer et stocker un identifiant associé à chaque internaute qui y a consenti, dans le respect du RPGD. Cet identifiant est pseudonymisé, c’est à dire que l’on ne sait pas qui est l’internaute mais qu’on arrive à le suivre au cours de la navigation entre différents sites.
Il n’y a évidemment pas de partage d’informations de navigation entre éditeurs qui n’appartiennent pas au même groupe et chacun est libre de choisir la manière avec laquelle il récolte son consentement qu’il s’agisse de proposer une option “continuer sans accepter” ou de mettre en place un cookie wall. Les deux principaux cas d’usage sont la personnalisation du contenu et l’optimisation de la diffusion publicitaire.
Concrètement ?
Par exemple, un annonceur qui veut maîtriser le capping entre différents sites au sein desquels il achète de la publicité. Grâce à first.id, il pourra y arriver, même sans cookie tiers. Ou un site e-commerce qui a intégré notre solution et qui, par ce biais, est à nouveau capable de lier une conversion chez lui à une exposition publicitaire chez un éditeur.
Comment s’opère la dépose du cookie 1st party ?
Lors de la première visite sur un site, on vérifie, après consentement, si le visiteur a déjà été identifié sur le réseau first.id. Et dans ce cas on partage cet identifiant sur le site et on le transforme en cookie first. La procédure paraît simple, mais il nous a fallu plusieurs mois pour la roder et la rendre optimale. Nous avons rendu l'intégration rapide et sans aucun effet de bord.
Et ça a donc déjà été déployé au sein des sites Prisma ?
"La solution est live sur l’ensemble des sites Prisma et Cerise Media, soit une vingtaine de sites"
Oui, la solution est live sur l’ensemble des sites Prisma et Cerise Media, soit une vingtaine de sites. Ce qui permet à first.id de déjà reconnaître 65% des internautes français. A la clé évidemment, une forte hausse des revenus liés aux inventaires pour lesquels la dépose de cookie tiers n’est plus possible. First.id est déjà compatible avec DV360, le DSP de Google, et l’essentiel des DSP du marché.
Quelle est la relation entre Prisma, votre ancien employeur, et first.id, votre nouveau projet ?
Ayant pu tester la solution, ils ont rapidement identifié les bénéfices de notre solution et compris que son adoption par l'écosystème aurait des effets décuplés pour tous. Ils sont sponsors du projet, je peux compter sur eux comme comme client et actionnaire pour le démarrage.
Les navigateurs ont le tracking cross-site dans le viseur et ils n’ont, par le passé, pas hésité à combattre les “hacks” du marché. Ça ne vous inquiète pas ?
First.id est une solution basée sur le cookie 1st party, hors c’est le cookie tiers qui est dans le viseur des navigateurs. Ce qui est selon moi une bonne chose car il est la plupart du temps partagé sans contrôle, au détriment des internautes et des éditeurs. Quand on y pense, le cookie tiers est l’un des principaux responsables du problème de répartition de la valeur de notre marché. En permettant à un annonceur de toucher les lecteurs de sites médias comme Capital, Voici ou Femme Actuelle sans avoir nécessairement à diffuser de pub au sein de ces sites, il pénalise ces sites qui investissent dans la production de contenu.
"Les éditeurs sont les grands déclassés du marché programmatique. Je ne trouve pas normal qu’ils touchent moins de 40% de la somme dépensée par l’acheteur pour emporter une enchère"
Les éditeurs sont les grands déclassés du marché programmatique. Je ne trouve pas normal qu’ils touchent moins de 40% de la somme dépensée par l’acheteur pour emporter une enchère. First.id veut y remédier pour permettre de conserver une information gratuite et de qualité. Car ce n’est sans doute pas Topics de Google, dont on voit déjà les limites (90% des sites médias vont se retrouver dans la même catégorie), qui les y aidera.
Sous réserve que les navigateurs vous permettent d’opérer…
Le poids des navigateurs est tellement important dans l'écosystème qu'aucune solution n'est à l'abri de leurs décisions... Pour autant, first.id est live depuis de nombreux mois et je ne vois pas pourquoi les navigateurs bloqueraient une solution mise en place par les éditeurs, qui respecte le RGPD. De plus, first.id suit complètement les bonnes pratiques des navigateurs sur l'utilisation du server-side.
Quel est le modèle économique ?
Plusieurs alternatives en fonction du mode d'activation de l'ID sont à l'étude. Dans tous les cas de figure, l'objectif est de remettre les éditeurs au centre de l’équation. L'utilisation de first.id se fera moyennant un faible pourcentage du CPM au moment de l'enchère, côté acheteur.
Pour participer à notre évènement "Future of cookieless" le 4 octobre, inscrivez-vous ici.
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