- 13 retailers, dont Carrefour, KingFisher France (Castorama et Brico-Dépôt), le groupe Galeries Lafayette, Rakuten France et ShowroomPrivé rejoignent l’aventure.
- Unlimitail, dont Alexis Marcombe devient le CEO, a également dévoilé de prestigieux partenaires médias, au sein desquels sa donnée sera accessible : France Télévisions, M6, Le Figaro, JC Decaux et Brut.
C’est la fin d’un feuilleton qui tient le petit monde du retail media en haleine depuis que Carrefour et Publicis ont annoncé, en novembre dernier, la création d’une joint-venture qui doit leur permettre de peser dans un marché archi-dominé par Amazon. Il aura donc fallu un peu plus de 6 mois au duo pour obtenir l’aval des différentes autorités de concurrence et définir les contours de la nouvelle structure. Et profiter de l’aura de Vivatech, un event “made in Publicis”, pour officialiser tout cela.
Arthur Sadoun, le PDG du groupe Publicis, et Alexandre Bompard, celui de Carrefour, ont ainsi dévoilé le nom de la nouvelle entité : Unlimitail. Un nom que certains trouveront peut-être un peu trop générique mais qui a le mérite de fonctionner dans l’ensemble des pays où opère la structure (Europe continentale et Amérique latine) sans être connoté Carrefour ou Publicis.
200 collaborateurs visés d'ici fin 2024
Pour rappel, Unlimitail, c’est une structure qui réunira les assets retail media des deux entités : la technologie de “Citrus Ad powered by Epsilon”, côté Publicis, la data et l’inventaire de Carrefour Links, côté Carrefour. Et, au milieu, une équipe de commerciaux, account managers et client success managers, tous issus de Carrefour Links, CitrusAd et Epsilon. Une petite centaine de collaborateurs aujourd’hui, le double d’ici fin 2024. À leur tête, Alexis Marcombe, MD de Carrefour Links, qui devient PDG d’Unlimitail et pourra notamment s'appuyer sur l'expertise de Thibault Hennion, le Managing Director des opérations internationales chez Epsilon, qui rejoint le board de l'entité.
“Unlimitail, c’est dès aujourd’hui une alliance de 13 retailers”, chiffre Alexis Marcombe. Carrefour, évidemment, mais aussi KingFisher France (Castorama et Brico-Dépôt), le groupe Galeries Lafayette (Galeries Lafayette, La Redoute, Bazarchic), Rakuten France, ShowroomPrivé Group (Showroomprivé, BeautéPrivé, The Gallery), ID Kids (Oxybul et Okaïdi), LabelVie, Luisa Via Roma,MyOrigins, Bringo, Electra Group, Maquillalia, Juguetilandia et Public. Il est important de préciser que tous n’auront pas la même relation avec Unlimitail, dont l’offre est très modulaire. Certains se contenteront d’utiliser la brique techno. D’autres lui confieront également l’exclusivité de la commercialisation, qu’il s’agisse de le faire onsite et/ou offsite, voire sur une partie seulement de leur demande (par exemple, la longue traîne ou les annonceurs endémiques).
C’est le cas de Kingfisher qui, un peu plus d’un an après avoir choisi la techno de CitrusAd, saute à pied-joint dans cette alliance en lui confiant la commercialisation d'une bonne partie de son offre retail media (Kingfisher garde la main sur la dizaine de ses plus gros annonceurs). Ce n’est, en revanche, pas le cas de Veepee, l’autre gros client français CitrusAd, chez qui la technologie est live depuis mi-mars. L’e-commerçant ne rejoint (pour l’instant ?) pas l’alliance. Cela s’explique sans doute par le fait qu’il a déjà une régie bien structurée sur le on-site, avec VeepeeAd, et l’extension d’audience, avec Adot. Et qu’il est par ailleurs peut être réticent à rejoindre une alliance au sein de laquelle figure son principal concurrent, Showroomprivé.
Pas encore de retailer allemand
Cet autre spécialiste des ventes évènementielles, qui était jusque-là autonome sur le sujet du retail media, s’est en effet laissé tenter par l’aventure Unlimital. Au même titre que trois autres retailers présents en France, Galeries Lafayette, Rakuten France et ID Kids et des retailers espagnols, italiens, grecs mentionnés plus haut. Des belles prises donc, même si on notera forcément l’absence de retailers allemands, un marché où CitrusAd commençait à se développer. C’est peu dire que la présence d’un gros morceau comme l’est Rewe, l’un des leaders de l’alimentaire en Allemagne, aurait été d’un autre cachet. Mais, comme le rappelle Alexis Marcombe, “c’était compliqué d’embarquer tout le monde en l’espace de deux mois."
C’est d’autant plus vrai que les équipes étaient également occupées à pitcher les premiers partenaires médias. De ce point de vue, c’est une vraie réussite puisqu’il y aura du beau monde pour diffuser la data d’Unlimitail en extension d’audience : deux acteurs de la TV, France Télévisions et M6, un autre de la presse écrite, Le Figaro, un géant de l’affichage extérieur, JC Decaux et un pure-player vidéo, Brut. On peut s’étonner de l’absence du leader du marché pub TV, TF1, pourtant très actif sur le front du retail media puisqu’il a déjà noué des accords similaires avec Infinity Advertising, la régie d’Intermarché - Casino, et Retailink, celle de Fnac-Darty. Une absence qui s’explique, selon nos informations, par un accord d’exclusivité noué avec le premier. Ce n’est donc peut-être qu’une question de temps…
Un objectif de 30% des revenus issus de l'extension d'audience
Du temps, Unlimitail ne veut pas en perdre sur le sujet de l’extension d’audience alors que, comme le rappelle Alexis Marcombe, “le retail media est aujourd’hui très concentré sur le on-site puisque ce dernier pèse pour 90% du marché.” Unlimitail veut que la donnée retail irrigue l’ensemble des canaux médias (TV connecté, Web, DOOH) pour s’approcher des 30% de revenus en extension d’audience assez rapidement. Il n’est évidemment pas le seul à avoir cette ambition mais il est indéniablement celui qui se donne les moyens d’avancer le plus vite sur ce sujet.
”Unlimitail, c’est une alliance qui représente aujourd’hui 120 millions de clients et 1,5 milliard de pages vues par mois”, chiffre Thibault Hennion. Des nombres qui sont évidemment voués à grandir dans les mois à venir, au fil des appels d’offres et des gains de budget. Avec, pourquoi pas des acteurs hors du retail, puisqu’Unlimitail ambitionne, à terme, d’en recruter. Qu’ils soient issus du voyage, du tourisme ou autre… Qu’importe tant qu’ils ont de la data 1st party. Cela prendra sans doute un peu de temps puisque les discussions, “déjà amorcées avec certains”, avancent lentement. Pas une surprise alors que le retail media reste marginal dans la stratégie de ces acteurs et qu’ils ne veulent donc prendre aucun risque par rapport à leur “core business”.
Les collaborateurs d’Unlimitail commencent d’ores et déjà à battre le pavé, pour pitcher auprès des retailers, industriels et agences médias les contours d’une offre que la structure veut la plus flexible possible. Qu’il s’agisse de proposer des produits sur étagères ou de faire du “custom”, une demande croissante des retailers qui ne veulent plus être noyés dans des réseaux retail media et pouvoir se différencier les uns des autres. Côté formats, on retrouve les classiques du retail media : bannière display, search on-site, brand pages et display off-site. Les vidéos shoppables, déployées chez CitrusAd outre-Atlantique grâce à un partenariat avec Sponsorcart, devraient suivre prochainement.
Même logique, côté annonceurs, qui peuvent opérer la plateforme eux-mêmes ou passer par les équipes d’Unlimitail pour le faire. “L’important, c’est qu’ils puissent passer par un guichet unique pour le faire et s’assurer que leur communication retail media est consistante d’un pays à l’autre”, précise Thibault Hennion. Du scale, comme le permet aussi la Retail Media Platform de Criteo. Parce que dans un univers retail media qui se fragmente de plus en plus, c’est surtout le reach qui fera la différence. De sorte que plus vous êtes gros, plus l’effet levier entre votre chiffre d’affaires e-commerce et votre activité retail media est important.
“Pour réellement peser dans l'alimentaire, il faudrait par exemple qu’Unlimital permette à un Danone de toucher au moins 50% de sa cible dans les principaux marchés d’Europe”
C’est, sans doute, là-dessus que l’on pourra juger le succès ou non de l’alliance. Embarquer 12 retailers en moins de 2 mois reste évidemment une prouesse mais il faudra qu’Unlimitail en recrute d’autres pour être plus que l’assemblage hétéroclite de retailers qu’il est pour le moment, vu que ses membres opèrent dans des verticales bien distinctes. “Pour réellement peser dans l'alimentaire, il faudrait par exemple qu’Unlimital permette à un Danone de toucher au moins 50% de sa cible dans les principaux marchés d’Europe”, illustre un expert du dossier.
Il s’agit, concrètement, de recruter un autre retailer alimentaire que Carrefour en France et faire de même en Allemagne, Espagne et Italie. Bien sûr, ça prend du temps et ça sera parfois compliqué à faire en France, un marché relativement concentré, parfois gangrené par les rivalités. Prenons le secteur du high-tech où mis à part Amazon, les deux autres acteurs majeurs sont Cdiscount (lié à Casino) et Fnac-Darty, qui a déjà une régie retail media forte. Il sera compliqué pour Unlimitail d’y peser. Du moins dans l’Hexagone.
La bonne nouvelle c'est que, si la France représente un peu plus de la moitié du business d'Unlimitail, les opportunités sont nombreuses hors de l'Hexagone. Alexis Marcombe rappelle ainsi qu'à peine un tiers des retailers allemands et espagnols sont, par exemple, équipés d’une solution retail media, contre quasiment les trois-quarts en France. “Il y a encore beaucoup à faire”, assure Alexis Marcombe. Il faudra peut-être, pour en convaincre certains, accepter d’ouvrir le capital de la joint-venture. “Ce n’est pas un sujet”, élude Alexis Marcombe.