- Unlimitail, l’alliance retail media de Carrefour et Publicis, fête sa première année d’existence.
- Minted a pu échanger avec son COO, Thibault Hennion, pour évoquer le lancement de la nouvelle offre retail media de Carrefour, le développement d’Unlimitail en Europe et les nouvelles sorties produit.
Minted. Alexandre Bompard et Arthur Sadoun ont annoncé, il y a près d’un an, le lancement d’une alliance retail media entre Carrefour et Publicis, Unlimitail. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Thibault Hennion. Unlimitail, c’est aujourd’hui un ensemble de 145 collaborateurs, répartis entre la France, l’Espagne, la Belgique et le Brésil. Ce sont désormais 28 retailers qui nous ont rejoint, contre 13 au moment de l’annonce, preuve que nous surfons sur une très bonne dynamique.
Nous travaillons aujourd’hui pour le compte de plus de 1000 annonceurs, dont la majorité des 100 plus grands CPG, et avons déjà diffusé plus de 17 000 campagnes onsite.
Votre plus grand succès ?
Chaque point ci-dessus est un succès à part entière, mais le premier succès, c’est sans doute l’intégration de Carrefour, un sujet sur lequel beaucoup de monde nous attendait, au vu du poids de ce retailer et du timing serré. L’ambition était d’être “live” dès la première semaine de janvier, ce que nous avons réussi à faire.
Nous avons déjà battu le record de delivery sur une journée (qui avait été réalisé l’an dernier, ndlr). C’est une vraie performance car ce genre de record se réalise au 4e trimestre, en général.
Et pourtant la bascule a été, selon les retours d’agences que j’ai pu récolter, assez difficile… Notamment parce que vous êtes repartis sur un modèle 100% managed et que tout l’historique de ciblage n’avait pas été préservé…
C’est normal pour une migration technologique de cette ampleur et c’était attendu. Notamment parce que cela bouscule les habitudes des commerciaux, des acheteurs, des trader…
C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de lancer l’offre uniquement en managed-service, durant les trois premiers mois, et que nous avons très peu changé la maquette publicitaire du site. C’est quasiment le même “look and feel”. Mais il y a naturellement beaucoup de choses qui ont évolué, car Citrus propose des choses différentes en termes de ciblage, de mesure, d’algorithme, de reporting, et cela se voit sur la performance.
Et concernant le self-service ?
Nous l’avons ouvert plus tôt que prévu, dès le début du mois d’avril, car la prise en main s’est très bien passée. Nous sommes d’ailleurs le premier retailer, parmi ceux qui se sont lancés cette année (ou qui ont changé de technologie), à proposer ce mode d’achat.
"Le self-service représente moins de 10% des campagnes à date"
Pour l’instant, la montée en puissance du self-service est très progressive, plus lente que ce que nous anticipions. Cela représente moins de 10% des campagnes, même si cela devrait augmenter rapidement au second semestre.
Une raison à celà ?
Il y en a plusieurs. Le self-service requiert le staffing adéquat côté agences, et cela prend nécessairement un peu de temps. Et peut-être que c’était plus un “nice to have” qu’un besoin immédiat.
Cela renvoie au cœur du business model des agences. Elles veulent disposer de toutes les options possibles pour offrir la gamme de services la plus large possible. Cela devrait monter en puissance au second semestre. Pour le sponsored product du moins.
Vous avez des doutes pour le display ?
Les spécialistes du retail media sont, grâce à Amazon, habitués à trader le format sponsored product. Le display, c’est une autre histoire. De fait, ce n’est pas du tout une demande du marché à date.
Vous avez mentionné être passé de 13 à 28 retailers. Qui sont les nouveaux arrivants ?
Déjà, il est important de préciser que les 13 retailers annoncés en juin 2023 sont tous live et nous les accompagnons sur de plus en plus de formats et de canaux.
"Nous venons de signer Mano Mano"
Sur les nouveaux clients, nous avons plus que doublé le nombre de nos clients en un an. Nous annonçons d’ailleurs officiellement l’arrivée de Mano Mano et espérons être “live” fin août. Nous annoncerons bientôt un autre acteur majeur du bricolage, confirmant notre leadership sur de ce secteur en France.
Sur d’autres verticales, nous travaillons avec plusieurs acteurs pan-européens comme Exertis (B2B consumer electronics), Promopharma (beauty/pharma) ou Deporvillage (sport). Nous devrions également annoncer l'arrivée d'un leader du prêt à porter dans les prochaines semaines.
Nous avons aussi profité des douze derniers mois pour accélérer en Europe du Sud et de l’Est. Parmi les plus connus, on peut citer IskayPet, leader du petfood en Europe du sud, ou PCDiga au Portugal. Le secteur du consumer electronics est d’ailleurs notre deuxième verticale, avec les market leaders Europe de l’Est et en Grèce, et nous devons être le premier acteur sur les marketplaces en Europe.
Il vous manque quand même, je trouve, un gros “win”. Un client un peu emblématique, qui vous permet de franchir un cap. En Allemagne, par exemple...
Nous avons gagné quasiment toutes les compétitions auxquelles nous avons participé donc difficile d'aller plus vite (sourires) ! Après la France et l’Espagne, qui sont les deux marchés d’Europe continentale les plus matures sur le sujet, nous allons nous développer en Allemagne et en Europe de l’Est. Nous venons d’ailleurs d'y recruter notre première salariée.
Choisir une plateforme retail redia, côté retailer, ne se fait pas du jour au lendemain. Les grands appels d’offres se comptent sur les doigts d’une main et les cycles de vente peuvent être très longs.
Comptez au minimum un an entre les premiers échanges et la signature, à l’image de ce que l’on voit dans les appels d’offre de grandes plateformes Martech. Auxquels il faut rajouter au moins 2 à 3 mois pour intégrer la technologie.
Le Royaume-Uni est hors de votre périmètre. Est-ce que ça aurait du sens pour Unlimitail d’y aller un jour ?
Nous pourrions y suivre certains de nos clients, mais probablement pas de manière plus systématique, et pour deux raisons. D’abord, CitrusAd y est déjà très bien implanté, puisque la technologie équipe quatre des plus gros retailers “grocery” : Tesco, Sainsbury, JLP Waiterose et Ocado. Il n’en reste pas beaucoup d’autres (NDLR, on peut citer par exemple Morrison et Asda).
Ensuite, le Royaume-Uni s’est aussi structuré de manière très spécifique : il est moins fragmenté, et la plupart des grands acteurs que je viens de mentionner ont déjà leur propre activité de régie, voire leur business Unit de Data Monetization/Media (Comme Dunnhumby pour Tesco ou Nectar 360 pour Sainsburry’s, NDLR).
La vision d’Unlimitail, c’est de surmonter la fragmentation que l’on voit en Europe continentale et d’aider les retailers à accélérer pour récupérer des parts de marché sur ce segment face à Amazon.
Peut-on imaginer ce modèle de joint-venture avec des acteurs locaux dans d’autres régions ?
Si on prend un peu de recul, le modèle Unlimitail a montré sa pertinence. La vitesse de conversion de nouveaux clients l’atteste, c’est la région la plus dynamique parmi toutes celles où Citrus est présent. C’est donc un pari gagnant
Pour entrer sur un marché où une technologie est peu présente, cela aurait beaucoup de sens de s’associer à un leader local. Il y a une dimension “culturelle” dans le retail media, avec des manières différentes de parler aux marques ou des préférences pour certains formats.
Un bon exemple, c’est la prévalence en Europe continental des bannières display versus le produits sponsorisé, alors que ce dernier format est omniprésent aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.
Côté produit, l’un de vos gros axes de développement, c’est l’extension d’audience…
Nous avons effectivement accéléré sur l’activation de la data offsite de Carrefour. Elle est désormais activable sur YouTube en collaboration avec Google, en TV segmentée et streaming avec nos premiers broadcasters M6, FTV et Altice Media Ads. Sans oublier la presse digitale, avec notre partenaire Le Figaro.
J’expliquais, début mai, comment le duo Unlimitail - Core ID pourrait rebattre les cartes du secteur des ID partagés. Où en êtes-vous du lancement de votre offre d’extension d’audience avec Epsilon ?
C’est effectif depuis début juin chez Carrefour. C’est également disponible chez MyOrigin’s et Rakuten. Et d’autres acteurs sont attendus dans les prochains mois pour en bénéficier au 4e trimestre.
Du coup, si un annonceur veut activer la data de Carrefour en extension d’audience, il doit forcément passer par Epsilon ?
Il a en réalité deux options. Soit il fait du self-service via Liveramp. Mais ça demande une certaine expertise et un degré d’implication qui ne sont pas toujours évidents à mettre en œuvre chez l’annonceur. Raison pour laquelle on laisse aussi des partenaires opérer cela.
L’autre option, c’est l’offre managed, qui est beaucoup plus axée performance et qui est, en effet, opérée par les équipes d’Epsilon.
D’autres produits à mettre en avant ?
Nous avons également développé une suite de reporting, pilotage et insights pour les campagnes onsite que nos clients pourront opérer en self-service. En plus de toutes les analyses que nous leur partagions déjà pour leurs campagnes onsite ou offsite.
Pourquoi ?
Parce qu’avec sa montée en puissance, le retail media voit ses besoins en reporting décuplés. Nous proposons une vingtaine de KPI que l’on retrouve dans la plupart des reporting directement sur la plateforme mais c’est encore mieux de pouvoir customiser les métriques de succès.
C’est désormais le cas. Qu’il s’agisse de calculer un halo ROAS à différent niveau (catégorie ou d’une gamme de produit, instore). Ou encore de définir sa fenêtre d’attribution sur différentes périodes.
Quid de la mesure de l’incrémentalité ?
Nous le faisons déjà sur le offsite et sur l’onsite, cela demande certains pré-requis sur le set-up de campagne et sur l’intégration chez le retailer afin d'avoir la granularité nécessaire à cette mesure. Nous commençons à avoir suffisamment de data et de recul pour y arriver. Mais ce n’est, pour être honnête, pas encore une demande systématique des clients. A l’heure actuelle un acheteur retail media attache beaucoup plus d’importance à son halo ROAS qu’à l’arrivée d’une mesure d’incrémentalité.
Mais le sujet va arriver, comme sur le programmatique. C'est pourquoi nous échangeons avec les différentes associations interprofessionnelles du marché, pour obtenir une mesure la plus cadrée et pertinente possible.