- Non, le retail media n'est pas qu'une affaire de gros, nous explique le directeur marketing des marques de plats préparés comme Wiliam Saurin, Zapetti ou Garbit.
- Philippe Lalère nous explique pourquoi et comment il s'est mis au e-retail media et, surtout, ce qu'il faut faire pour que celà marche lorsque l'on y consacre des budgets relativement modestes.
Minted. Vous êtes le directeur marketing de Cofigeo, marque de plats préparés comme William Saurin, Zapetti ou Garbit. Comment êtes-vous venu au e-retail media ?
Philippe Lalère. Il faut savoir que les plats cuisinés comme les nôtres sont surtout achetés dans une logique de dépannage, la fréquence d’achat est donc relativement faible, avec en moyenne 4 achats par an. Le e-retail media est un bon moyen de réengager le shopper, de créer des occasions de mettre nos produits dans son panier. C’est donc avant tout une réponse à un enjeu de recrutement.
Combien dépensez-vous en e-retail media ?
Nous avons commencé en 2023, c’est encore très neuf. Le e-retail media représente 5% de nos budgets marketing dans leur ensemble. Si on ne prend que le budget communication, cela représente un ratio de 7 et 8%. Ratio qui, vu que le drive revêt un gros enjeu stratégique pour nos marques, pourrait augmenter dans les années à venir.
D’où vient cette enveloppe ?
Cette enveloppe a été prise sur des budgets qui étaient, jusque-là, alloués au mass media et qui sont stables d’une année sur l’autre. Ce n’est donc pas du “on top”, il a fallu faire des arbitrages.
Notre budget retail media est, pour l’instant, relativement modeste. D’où la nécessité d’être ROIste et d’être capable, pour chaque prise de parole, d’identifier un impact sur les ventes. Ce qui n’est pas évident à faire quand vous avez, comme c’est notre cas, de nombreuses marques à votre portefeuille.
Il n’y a pas d’unicité dans les prises de parole et il faut parfois prioriser les actions e-retail media à mener, en fonction des temps forts de chaque marque. Il faut faire des choix, travailler en priorité les produits qui ont un bon niveau de diffusion chez chacun, vu que notre assortiment eretail varie selon les distributeurs. Et surtout, le faire en fil rouge, pour que cela ait un impact.
On peut réussir à avoir de l’impact en e-retail média lorsqu’on opère des “petits” budgets ?
On peut faire des campagnes intéressantes avec un budget compris entre 10 et 30 000 euros. C’est évidemment un tout autre ordre de grandeur que ce que peut absorber une campagne TV, vu que l’on parle d’au moins 1 million d’euros pour une vague de 3 semaines.
L’agence média qui nous accompagne sur le sujet, Bascule, estime même qu’on peut faire du sponsored product à partir de 5 000 euros par campagnes. Ce n’est donc pas un levier qui est réservé aux gros annonceurs.
Quels étaient, plus en détail, l’objectif de vos dispositifs e-retail media ?
D’abord, remédier à la mauvaise visibilité de la rubrique “plat préparés” qui est, lorsqu’un internaute fait ses courses en ligne, assez peu visitée. L’objectif, c’est donc d’aider la marque à sortir de ce rayon, grâce à des formats display que l’on met en avant au sein d’autres catégories qui sont, elles, beaucoup plus visitées. On y adjoint, le plus souvent, un incentive, qu’il s’agisse d’un format gaming ou d’une promotion.
L’objectif, c’est aussi d’améliorer la visibilité de nos produits au sein de leur catégorie, notamment face aux MDD. C’est possible via l’activation de formats “sponsored product” qui sont, eux, achetés en fil rouge et nous permettent de préempter les premières positions des résultats de recherche.
Quelles sont, selon vous, les conditions de succès d’une campagne d’e-retail media ?
Il faut, comme je vous l’ai déjà dit, que le produit soit bien référencé. C’est même le nerf de la guerre : animer des marques qui ont une bonne couverture.
Dans cette perspective, il est évidemment crucial d’engager le distributeur, via sa régie notamment, et de valoriser ce que l’on fait. C’est important parce que ces budgets e-retail media ne sont pas intégrés aux accords de trade marketing et que le distributeur n’a, à ce titre, pas toujours une bonne visibilité de ce que vous faites chez lui. Il faut le valoriser.
L’autre enjeu, c’est de corréler cela avec ce que l’on fait en mass media, pour avoir un effet levier plus important. C’est donc pertinent de profiter d’une campagne TV pour engager des actions eretail media, de manière tactique.
Vous avez mentionné l’agence Bascule, qui vous accompagne sur tout le volet e-retail media. Pourquoi ?
C’est, lorsque vous n’avez pas de service dédié ou d’expert e-retail media chez vous, indispensable de passer par un tiers. Ne serait-ce que pour avoir la certitude de pouvoir engager les bons interlocuteurs côté régie. Mais aussi, évidemment, profiter du pouvoir de négociation de ces acteurs qui, dans une logique de centrale d’achat, obtiennent de meilleures conditions de ventes.
Un frein que vous identifiez ?
Je ne sais pas si c’est un frein. Je dirais plutôt un écueil. Il vous faut éviter d’intégrer les dispositifs e-retail media à vos accords de trade marketing. C’est parfois une demande du distributeur qui, ce faisant, réussi à sécuriser une ligne de revenus.
Mais ce n’est pas dans l’intérêt de l’annonceur, car ces budgets trade marketing sont, le plus souvent, des budgets qu’on dépense pour le fait de dépenser. Or, comme je vous l’ai dit, ce qu’on cherche en e-retail media, c’est d’abord de l’impact sur les ventes.