- La société fondée par Maxime Garrigues veut plateformiser la pratique de l'asilage de colis, soit le fait de mettre des objets publicitaires dans les colis que les commerçants livrent à leur clients.
- Elle propose aux annonceurs, essentiellement des DNVB, une plateforme semblable à celles de Google et Meta pour faire du ciblage affinitaire at scale.
Dans cette croissance effrénée que vit le retail media (Warc annonce désormais un marché de près de 128,2 milliards de dollars dans le monde), il est un point de contact jusque-là un peu laissé de côté : le colis. Le potentiel est pourtant immense à en croire Maxime Garrigues, fondateur de Getinside, première plateforme de commerce media spécialisée dans la monétisation et l’échange d’audiences de colis. “Ce sont près de 2 milliards de colis qui ont été envoyés en France l’année dernière d’après l’Arcep”, chiffre le dirigeant.
Le problème, c’est qu’ils sont encore trop rares à capitaliser sur ces points de contacts à très forte visibilité. Quelques commerçants qui font ça chacun dans leur coin, essentiellement pour glisser de l’auto-promo dans le colis et, plus rarement, des coupons de marques partenaires. Et au milieu, quelques agences spécialisées, des “brokers” de colis, chargées de mettre en relation la supply (les commerçants) et la demand (les marques) mais qui le font de manière très artisanale.
On parle, dans le jargon, d’asilage. “Une pratique vieille comme les VPC” que Maximie Garrigues veut aujourd’hui booster, en la plateformisant grâce à Getinside, société qu’il a lancée en mai 2022. “Il s’agit de permettre à un annonceur de choisir les commerçants qui ont une audience affinitaire avec sa cible, pour glisser, au sein de leurs colis, des expériences publicitaires allant de la carte avec coupon de promotion au produit gratuit”, résume Maxime Garrigues.
Depuis la plateforme, vous pouvez, en quelques clics, choisir le dispositif publicitaire (carte, objet…) et mettre en place des filtres pour identifier les commerçants les plus affinitaires.
Vous accédez, pour chacun d’entre eux, à une répartition par genre de l’audience, un âge moyen, un volume de colis envoyés chaque semaine et évidemment, un coût par colis, qui est fixé librement par chaque vendeur (et qui oscille entre 15 et 90 centimes d’euros).
Une fois vos partenaires sélectionnés, vous obtenez un récapitulatif de campagne intégrant : le nombre de colis envoyés, le total de contacts touchés (estimé), le coût moyen par colis, le coût par contact et le coût total de la campagne. Ne vous reste plus qu’à appuyer sur un bouton pour finaliser tout celà et… attendre. Un délai incompressible de trois semaines est nécessaire, précise Getinside.
L'asilage de colis plateformisé
Ce sont aujourd’hui près de 500 clients qui se sont laissés séduire par une promesse qui fait beaucoup penser à celle de Google Ad Manager ou Meta Business Manager. Dans le lot, beaucoup de DNVB, comme Hellofresh, qui font face à une hausse constante de leurs coûts d’acquisition sur les leviers habituels que sont Meta et Google. Des DNVB qui doivent également composer avec des contraintes règlementaires (RGPD et recommandations de la Cnil sur les cookis) qui limitent de plus en plus la capacité du secteur à faire du ciblage d’audience.
“On leur donne accès à des bassins d’audience très affinitaires et pourtant très peu exploités”, précise Maxime Garrigues. Avec, qui plus est, la possibilité de tracker l’efficacité des campagnes puisqu’à l’introduction quasiment systématique d’un call-to-action, qu’il s’agisse d’un code promo ou d’un QR code à scanner, permet à Getinside de communiquer des KPI.
Un CTR moyen de 1,66% et un coût d'acquisition du lead qui est descendu jusqu'à 3,8 euros
“Nous obtenons un CTR moyen, soit le taux de scan, qui est de 1,66% sur l’ensemble des campagnes. Avec un hit à près de 7%", chiffre Maxime Garrigues. Le coût d’acquisition est, lui, descendu jusqu’à 3,8 euros. “Forcément alléchant pour des marques qui sont parfois contraintes d’acheter des leads entre 50 et 100 euros sur Meta et Google”, assure Maxime Garrigues. Le dirigeant a tellement confiance en la force de son modèle qu’il lancera prochainement une tarification au coût par lead qui devrait avoisiner les 30 euros (avec un flat fee très faible de 7 centimes par colis).
A date, trois formules sont proposées aux annonceurs. Ils peuvent payer au coût par colis dans une logique de "paid" classique. S’ils monétisent eux-aussi leurs colis via Getinside, ils peuvent procéder à un échange d’audience pour diminuer le coût de l’opération en mode "exchange". “Dans ce cas-là, il n’y a pas d’obligation de réciprocité, précise Maxime Garrigues. Vous n’êtes pas obligé d’utiliser l’audience de celui qui diffuse chez vous. Vous gagnez des crédits que vous pouvez activer chez les autres membres.” Cettre offre est aussi un moyen, pour Getinside, de créer de la liquidité d’inventaire. L’adhésion à l’exchange est facturée 780 euros l’année. Une somme à laquelle il faut rajouter 350 euros par campagne. Le paid représente 70% des budgets dépensés au sein de GetInside, l’exchange 20% et le hub, qui voit le commerçant vendre lui-même les campagnes, 10%.
Le ticket d’entrée est généralement compris entre 15 et 20 000 euros par campagne. Getinside se rémunère via un pourcentage de ce budget media. La plateforme prélève également des frais supplémentaires lorsque le commerçant lui confie, comme c’est souvent le cas, la création du dispositif (carte promo ou autre). Dispositif qui doit être, comme le rappelle Maxime Garrigues, suffisamment attractif pour que l’engagement soit au rendez-vous. “On est sur un media non intentionniste, rappelle l’expert. Il faut bien réfléchir à l’objectif que vous voulez atteindre et à la mécanique qui vous permettra d’y arriver.” Généralement, c’est une promotion spéciale ou un jeux-concours qui seront mis en avant.
500 000 euros de CA en 2023 et déjà 2 millions de colis monétisés
Getinside grandit vite. “Nous venons de passer le cap des 2 millions de colis monétisés, 6 semaines après avoir atteint le premier million”, se félicite Maxime Garrigues. Pour les nombreux commerçants qui font aujourd’hui confiance à Getinside, c’est d’abord le meilleur moyen d’aller chercher du business incrémental. C’est le cas de Brico-privé. “Getinside me donne accès à des annonceurs non captifs”, témoigne Mathieu Ratié, patron du retail media de la plateforme qui, après une premier campagne en juillet, est déjà quasiment complet jusqu’à la fin de l’année.
Il faut dire que certains segments d’audience de ce vendeur de bricolage sont très prisés. “Nous avons 70% de propriétaires parmi nos clients. C’est un ratio qui intéresse beaucoup de marques.” L’expert salue également l’UX de la plateforme, qui lui permet d’avoir une visibilité de son inventaire qu’il n’avait pas forcément jusque-là, via ses Google Sheets.
Le chiffre d’affaires de Getinside devrait avoisiner les 500 000 euros cette année. “La performance est plutôt bonne si l’on considère que l’on a commencé à vendre en février, avec une équipe et un inventaire plutôt limité”, analyse Maxime Garrigues. Preuve de la traction récente : 50% du chiffre d’affaires a été réalisé depuis fin août. Avec côté supply, quelques belles prises comme Kiabi, Mano Mano ou encore Auchan, dont l'arrivée aura, au vu de leur poids, sans doute un impact sur le business très prochainement.
Getinside, c'est aujourd’hui 8 collaborateurs, basés entre Toulouse (l’équipe tech) et Paris (l’équipe commerciale). La société a procédé à une première levée d’amorçage l’année dernière, auprès du fonds Founders Future et de quelques business angels du retail et de l’adtech. La plateforme a déjà l’Allemagne et le Royaume-Uni dans le viseur, deux marchés plus matures en matière d'asilage mais qui manquent, eux aussi, d’analytics et de scalabilité.
Maxime Garrigues veut également continuer à enrichir son offre, avec notamment l’introduction de basiques du retail media, tels que l’emailing partenaire, l’ajout au panier ou la possibilité de sponsoriser des posts Instagram. “Les distributeurs peuvent être des influenceurs comme les autres”, estime celui qui voit le secteur du retail media se scinder entre, d’un côté, des gros distributeurs, qui font des alliances, connectent et intégrent des technos comme Citrus, Criteo… Et de l’autre, une longue traîne de petits et moyens commerçants - les SMB dans le jargon - qui ont, eux, tout intérêt à laisser un intermédiaire opérer la plupart des leviers retail media pour leur compte, en rejoignant une marketplace qui leur fait gagner en visibilité.