- Le fondateur de C Wire, SSP suisse qui s’est lancé en France il y a quelques mois, nous explique pourquoi il n’a pas peur de s’attaquer à un marché déjà bien encombré et détaille les spécificités de son approche contextuelle.
Minted. Adtech suisse, C Wire se lance en France. Pouvez-vous nous présenter la société ?
Rui de Freitas. C Wire, c’est une adtech que nous avons lancée en Suisse courant 2020. Nous avons planché, une année durant, sur la techno, avant de nous lancer commercialement. Les marchés germanophones, l’Autriche et l’Allemagne, ont suivi. Avant un lancement commercial en France au 2e trimestre 2023. D’abord à distance, puis en présentiel, avec le recrutement de notre première sales, Tiguida Dembelé.En 2020, l’adtech était déjà bien encombré. Pourquoi vous lancer ?
La genèse de notre histoire, c’est vraiment la disparition des cookies tiers, suite à l’annonce de Google sur le sujet.
Ce qui nous a interpellé, c’est le choix pris par pas mal d’éditeurs de miser sur les ID partagés. Des ID qui sont soit déterministes, mais durs à scaler, soit probabilistes, mais durs à stabiliser. Et qui, dans les deux cas, nous semblaient aller à l’encontre du problème que Google voulait résoudre en supprimant les cookies tiers : protéger la vie privée des utilisateurs.
Quelle était l’alternative ?
Une approche contextuelle. Mais pas le contextuel auquel vous pensez sans doute, tel qu’il est pratiqué par nombre d’adtech.
Sur le fond, rien ne change. Évaluer la pertinence d’une impression publicitaire sans utiliser de donnée liée à l’utilisateur. Sur la forme, on va beaucoup plus loin puisqu’on prend en compte des dimensions jusque-là occultées par les acteurs du contextuel. Le type de création affichée, l’objectif de la campagne, le produit vendu… Autant de données qui doivent nous permettre d’identifier les meilleurs contextes dans lesquels diffuser une campagne.
Comment procédez-vous concrètement ?
En crawlant les pages liées à des requêtes intentionnistes, en essayant de comprendre le contenu qui y est affiché et, une fois ce travail effectué, en les indexant. Tout cela alimente des modèles qui sont capables de déterminer, dans le cadre d’une campagne qui veut maximiser le nombre de clics, les types de contenus les plus efficaces.
Vous vous intégrez également avec les éditeurs…
C’est vrai, cela nous permet d’avoir une parfaite connaissance de leur inventaire publicitaire puisque cette intégration, en direct, nous permet d’accéder à un niveau d’information qui n’est pas disponible en Open RTB. Par exemple, l’URL complète ou la position de l’emplacement publicitaire concerné sur la page.
Quels éditeurs français avez-vous embarqués ?
Nous avons démarré avec Prisma Media et Reworld Media. Nous sommes en cours d’intégration avec 366, qui inclut depuis peu l’inventaire de 20 Minutes, et nous avons mené des tests sur le site de Gala, ce qui nous a permis d’échanger avec media.Figaro.
Globalement, nous discutons avec tous les éditeurs du marché français et avons d’ores et déjà un reach suffisamment important pour accélérer le développement commercial. Nous travaillons avec quelques agences médias et avons déjà une vingtaine de campagnes prévues pour les prochains mois.
Comment vous intégrez-vous en programmatique ? Plutôt client ou server-side ?
Nous nous adaptons au besoin des éditeurs. Dans la mesure où nous sommes cookie3dless, et que nous n’avons donc pas d’enjeux de cookie syncing, nous pouvons très bien nous “contenter” d’une intégration server-side.
Le marché français est déjà bien encombré. Qu’est-ce qui vous fait dire que vous avez une place à prendre ?
Notre porte d’entrée, c’est l’inventaire dépourvu de cookies tiers, qui est, à mon avis, un peu négligé par nos concurrents. Et notre première promesse, c’est de permettre aux éditeurs de générer des revenus publicitaires sur Safari et Firefox qui sont à la hauteur de ce que ces environnements pèsent côté audiences.
C’est un positionnement hyper vertueux car cela leur permet d’intégrer C Wire sans trop toucher à ce qui marche déjà bien, c’est-à-dire Chrome. Nous leur apportons un incrément direct de monétisation.
Du coup, vous délaissez Chrome ?
Non ! Disons juste que nous avons un “bid rate” qui y est plus bas car l’environnement est beaucoup plus compétitif pour la raison que je viens d’évoquer.
C’est d’ailleurs, selon moi, le meilleur moyen de savoir si un adtech est vraiment cookie3dless. Regarder ses “bid rate” sur Chrome, Safari et Firefox. S’il est bas sur ces deux derniers, c’est sans doute que non. Si on prend le cas de C Wire, nous diffusons 47% de nos impressions dans ces environnements sans cookies tiers alors qu’ils représentent 41% des bid requests que nous écoutons.
Comment êtes-vous financés ?
Nous avons déjà levé 2 millions d’euros, en pre-seed et seed. Nous sommes d’ores et déjà profitables et, comme je vous l’ai dit, nous grandissons vite. Nous sommes une vingtaine et ambitionnons de muscler nos effectifs en 2025.
Beaucoup de SSP remontent la chaîne de valeur, avec des interfaces pensées pour le buy side. Qu’en est-il de votre côté ?
Nous proposons une plateforme qui permet aux acheteurs de créer leurs propres deals. Ils peuvent, ensuite, activer ces deals en programmatique, via leur DSP ou en gré à gré. C’est vraiment en fonction de ce que le client demande même si la réalité c’est qu’on fait encore 80% de gré à gré.
Un mot sur la récente annonce de Google ?
C’est sûr que ça va nous contraindre à faire, à nouveau, preuve de pédagogie auprès des annonceurs, pour qu’ils comprennent bien que l’annonce de Google ne change pas l’issue des choses. Les cookies tiers vont bien disparaître, ils vont juste le faire d’une manière différente. Il est donc crucial de continuer à développer les alternatives.