Dans l’adtech, la lente progression de la représentation des femmes

L'adtech ne fait pas exception à la sous-représentation des femmes. Pour inverser la tendance, l’association The Women in Programmatic Network nourrit des souhaits de parité, d’égalité salariale et d’empowerment au féminin. Un combat qui prendra du temps, mais qui évolue déjà dans le bon sens. Etat des lieux à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes.

L'équipe de l'association The Women in Prgrammatic Network

Un chiffre frappant illustre la place des femmes dans le secteur de l’adtech en France: 0. À ce jour, aucune donnée n’existe sur le sujet. Selon Arthur Millet, directeur général de l’association Alliance Digitale, plusieurs raisons expliquent ce vide statistique: l’adrech est un petit secteur, à dominante anglo-saxonne, et les entreprises n’ont pas pour habitude de partager ces données dites “sensibles”. “On peut néanmoins estimer à 30% environ la part de femmes qui travaillent dans l’industrie”, déclare Estelle Reale, membre de la direction de l’association The Women in Programmatic Network en France.

C’est du côté du secteur plus global de la tech que des chiffres officiels permettent de comprendre la situation en France: en 2023, les femmes occupaient 24 % des emplois dans les professions numériques selon l’INSEE. Elles sont 36% à occuper des métiers purement techniques comme l’informatique et les systèmes d’information. Selon une étude de Boston Consulting Group (BCG), un homme a levé 1,6 fois plus de fonds qu’une femme en 2021.

Julie Walther, cofondatrice de Qwarry, a observé ce même phénomène dans le secteur de l’adtech: “Il est toujours plus difficile pour une femme d’aller chercher des financements. Ce sont toujours les mêmes profils qui créent des startups dans le secteur: des hommes, souvent en trio. En tant que cofondatrice d’une entreprise dans l’adtech, je suis un cas à part. J’ai décidé de prendre mon destin en main, de faire les choses par moi-même, mais ce n’est pas une démarche facile. Je souhaite qu’il y ait plus de modèles féminins pour que les professionnelles du secteur se disent que c’est possible”.

Le rôle de The Women in Programmatic Network en France

Favoriser “l’empowerment” des femmes dans le secteur, c’est là toute la mission de l’association The Women in Programmatic Network. Créée en 2018 à Londres par Sophie Toth et Emilie Roberts, son objectif est clair: offrir aux femmes un espace d’échange et de formation afin de les aider à accéder à des postes techniques et de direction.

Le bureau français a ouvert ses portes en 2023 et a rassemblé 200 participantes dès son lancement. Aujourd’hui, il compte 300 membres. Comme l’explique Anne-Claire Cornée, l’une des membres de la direction de l’association, “il y avait un vrai besoin d’un espace dédié pour les femmes dans l’AdTech, où elles peuvent partager leurs expériences et monter en compétence”.

L’association propose plusieurs rendez-vous à ses membres:

Des sessions virtuelles mensuelles pour monter en compétence sur des sujets experts tels que le retail media ou l’innovation technologique.
Des sessions de coaching afin de redonner confiance aux professionnelles et dépasser le fameux “syndrome de l’imposteur”.
Des soirées en présentiel, deux à trois fois par an, pour se rencontrer et échanger entre membres. “Ces soirées sont également ouvertes aux hommes et ils sont de plus en plus nombreux à nous rejoindre. C’est important, car ils peuvent nous aider à faire bouger les lignes“, explique Estelle Reale.

L’accès au réseau de The Women in Programmatic Network est gratuit. L’association bénéficie du soutien de plusieurs partenaires tels que Criteo, Ogury, The Trade Desk et Weborama.

A lire également : “L’égalité des sexes n’est pas seulement une question de morale ou de justice sociale, c’est aussi un facteur clé de réussite pour les entreprises”

Des femmes inspirantes à suivre

Selon Anne-Claire Cornée et Estelle Reale, plusieurs figures féminines dans le secteur de l’adtech et du programmatique peuvent en inspirer d’autres, par leur parcours et leur engagement. C’est le cas d’Anne-Marie Kalinka, directrice générale d’Amnet France, qui a à cœur de former de jeunes tradeuses aux métiers programmatiques tout en conciliant vie professionnelle et personnelle. Elles citent également Estelle Decré-Ravez, directrice France de Criteo, qui est arrivée à un haut poste de direction d’une entreprise internationale avec quatre enfants. Enfin, Laure Malergue et Marie Gaestel, toutes deux cofondatrices de Displayce, ont créé une startup qui s’est développée avec succès à l’international.

Une situation qui évolue doucement

L’antenne française de The Women In Programmatic Network est jeune et les deux membres de la direction sont conscientes que nous ne sommes qu’au début d’un processus qui prendra du temps.

“Parfois, on nous donne l’illusion que les choses avancent, mais il y a encore un long chemin à parcourir”, souligne Anne-Claire Cornée. Selon elle, le jour où une femme prendra la parole en réunion sans hésiter, ce sera déjà une grande avancée. “En continuant nos actions, la situation ne peut que s’améliorer”, ajoute Estelle Reale.

Un nouveau bureau vient d’ouvrir ses portes en Belgique pour accompagner les professionnelles de la publicité programmatique dans le plat pays. Pour célébrer l’ouverture officielle, un événement de networking se tiendra le 27 mars prochain à Bruxelles.

A lire également : The Women In Programmatic France : “Nous accompagnons Oreegami dans le lancement d’une promotion trading dédiée aux jeunes mamans”