- Deutsche Telekom investit dans l'adtech française qui pourra l'aider à optimiser les investissements publicitaires digitaux de certaines de ses filiales et les revenus CTV et segmentées d'autres.
- Un partenariat qui permet à Equativ d'asseoir un peu plus sa crédibilité face aux géants américains de sa catégorie.
Equativ fait entrer un nouvel actionnaire à son capital selon nos informations. Il s’agit de T-capital, le fonds du géant allemand des télécoms, Deutsche Telekom, qui rejoint le board de l’adtech française à la faveur d’un investissement dont “le montant est symbolique”, précise Arnaud Créput, le président d’Equativ.
L’opération est, en effet, plus un moyen de capitaliser sur les synergies entre les deux entités… que d’injecter de l’argent frais, un an après le rachat d’Equativ par le fonds d’investissement Bridgepoint.
L’histoire entre Equativ et Deutsche Telekom a commencé au second semestre 2023, à la faveur d’un contrat noué sur le volet server-side ad insertion (SSAI). Cette technologie, qui permet d’optimiser le ciblage publicitaire tout en préservant la qualité du flux vidéo, est opérée par Nowtilus, la solution d’Equativ, sur tout l’inventaire publicitaire de Magenta TV. “Un Salto à l’allemande qui regroupe notamment les inventaires CTV de RTL Deutschland et ProSieben”, précise Arnaud Créput.
Le premier étage de la fusée, à en croire Arnaud Créput, qui ne manque pas d’idées au moment d’évoquer les synergies possibles entre Equativ et la galaxie Deutsche Telekom. A commencer par le déploiement d’une solution d’adserving et de monétisation des environnements TV adressée. Une offre dont Deutsche Telekom ne dispose pas à ce stade et qui serait très similaire à celle qu’Equativ a déployée pour le compte de Bouygues Telecom en France.
“Aider les broadcasters à gérer leur inventaire TV segmentée fait partie de nos ambitions”
“Cette offre, baptisée TVMotik, nous permet de proposer de l’inventaire TV linéaire et CTV pour un agrégat de chaînes du tiers 2 et du tiers 3 qui sont consommées par les abonnés Bouygues Telecom”, précise Arnaud Créput. Equativ a signé un partenariat similaire avec le plus gros telco mexicain, Mediacable, et ambitionne donc de faire de même avec le telco allemand.
Avant de, pourquoi pas, gérer l’offre de TV segmentée de Magenta Sport, la chaîne linéaire propriétaire. “Aider les broadcasters à gérer leur inventaire TV segmentée fait partie de nos ambitions”, rappelle Arnaud Créput.
C’est, côté Deutsche Telekom, l’occasion d’influer un peu plus sur la roadmap produit d’une technologie qui pourra, à bien des égards, lui rendre des services. Par exemple, dans l’accompagnement de Deutsche Telekom et de sa filiale américaine, T-mobile, dans la gestion d’une partie de leurs investissements médias digitaux.
Deux annonceurs qui pourraient profiter de la plateforme de curation d’Equativ, Buyers Connect, pour optimiser la chaîne de valeur programmatique sur tous leurs investissements consacrés à l’Open Web.
“L’objectif, c’est de proposer un chemin le plus direct possible aux inventaires programmatiques, pour faciliter l’activation de la data et réduire les coûts”, détaille Arnaud Créput. Une promesse que le telco, qui ambitionne également d’internaliser une partie du trading digital et d’accélérer sur tout ce qui touche au SPO, pourrait enfin concrétiser via ce partenariat avec Equativ.
Deutsche Telekom et T-mobile, ce sont près de 3,5 milliards de dollars de dépenses publicitaires chaque année. Rien que la portion digitale de ce budget permettrait de booster sensiblement le business d’Equativ, notamment outre-Atlantique. Ce qui, dans la perspective d’une introduction d’Equativ au Nasdaq, une option envisagée depuis quelques années, n’est évidemment pas anodin.
“Les discussions sont plus avancées en Europe qu’aux Etats-Unis”, prévient Arnaud Créput. Elles pourraient être, à terme, étendues à Sprint, autre opérateur américain appartenant à Deutsche Telekom. “Ils ne sont, à ce stade, pas dans la boucle”, précise néanmoins Arnaud Créput.
Bientôt un package d'inventaire au sein duquel transite Utiq via la curated marketplace d'Equativ ?
Deutsche Telekom est également l'un des fondateurs de l'adtech Utiq, solution d’ID partagé dont nous vous avons déjà parlé sur Minted et qu’Equativ a été le premier SSP à intégrer en Europe. Une solution qui pourrait, elle aussi, s’appuyer sur l’offre de curated marketplace d’Equativ pour proposer aux acheteurs médias un package d’inventaire au sein duquel transite son ID, comme il le fait sur des sujets comme la sustainability, l’attention ou d’autres ID partagés. Et de quoi faire d’Utiq le premier ID alternatif d’Europe ?
“Ce serait l’objectif”, confie Arnaud Créput, tout en précisant qu’Equativ, qui a également des intégrations avec ID5, First ID et consorts, restera agnostique. “Nous nous adaptons aux demandes du marché.”
Ce partenariat entre l’adtech française et le telco allemand, s’il se concrétise sur tous les points évoqués, fera de Deutsche Telekom le premier client d’Equativ dans le monde. “Soit près de 10% de notre chiffre d’affaires, si on agrège les parties supply et demande”, chiffre Arnaud Créput.
Deutsche Telekom pourrait représenter, à terme, 10% du chiffre d'affaires Equativ
Un partenariat que le dirigeant n’exclut pas de nouer avec un autre telco d’envergure, si certains veulent s’en inspirer. “Deutsche Telekom est le 4e plus gros opérateur télécom dans le monde. Evidemment que ce partenariat renforce notre crédibilité”, justifie Arnaud Créput. Et de rappeler que des alternatives à Google existent, pour ceux qui estiment que leurs données sont trop critiques pour être mises dans les mains du géant américain.
Vous l’aurez compris, ce deal, au-delà de l’apport d’affaires indéniable qu’il constitue pour Equativ, est aussi un moyen pour l’adtech française de s’asseoir à la table des grands. Pas un luxe quand on sait que les choix de certains appels d’offres ont souvent une dimension politique.
“C’est sûr que c’est parfois plus simple d’aller avec un gros américain comme Google ou Freewheel que de faire confiance à un challenger, comme l’était Equativ, jusqu’à ce partenariat d’envergure”, reconnaît Arnaud Créput.
“Il y a une dimension politique… mais il y a aussi une dimension de confiance, nuance un connaisseur du marché. La gestion de l’adserving d’un broadcaster est un sujet tellement complexe, avec des règles de concurrences très strictes, qu’effectivement les chaînes sont peu enclines à faire confiance à des nouveaux venus.”
Et de noter que même Xandr, un géant américain qui équipe Netflix, est toujours à la recherche de son premier broadcaster. En cela, la présence de Deutsche Telekom donne de sérieux gages de garantie à la candidature d’Equativ.
Equativ qui ne cesse de croître. “Nous avons fait 45% de croissance annuelle sur les trois dernières années”, rappelle Arnaud Créput. Un ratio qui retombe à 30%, si l’on inclut que l’organique, mais qui a de quoi faire envie à pas mal de concurrents.
“Notre chiffre d’affaires organique a doublé au cours des trois dernières années”, ajoute Arnaud Créput. L’adtech reste, malgré le contexte difficile, en croissance, de + 20% au premier trimestre 2024, et espère maintenir ce cap sur l’ensemble de l’année.
“Le gros chantier du moment, c’est le lancement de notre plateforme de media buying, qui est en beta test chez certaines agences médias”, explique Arnaud Créput. Là où, par le passé, les acheteurs étaient contraints de basculer sur un DSP externe pour activer les deals programmatiques qu’ils avaient paramétrés au sein de la curated marketplace d’Equativ, ils vont pouvoir, bientôt, tout opérer depuis la plateforme, grâce à l’introduction d’un module d’achat direct.
“Le but, ce n’est pas de concurrencer frontalement les DSP mais d’offrir un dispositif complémentaire, end-to-end, dans la lignée de notre repositionnement en programmatic direct platform”, précise Arnaud Créput. C’est, en tout cas, une offre qui s’inscrit dans la mouvance actuelle, qui a vu des acteurs comme Magnet et Pubmatic faire de même, il y a quelques mois.