- Florent et Vincent Alzieu, fondateurs des Numeriques et pionniers du content-to-commerce, lancent une plateforme "tout en un" pour aider les éditeurs à optimiser leurs revenus en la matière.
- Affilizz, qui compte Reworld Media comme actionnaire minoritaire, réunit aujourd'hui près de 80 éditeurs.
Démocratiser le content-to-commerce, cette pratique qui permet à un média d’être commissionné pour des achats réalisés suite à la consultation de comparatifs ou de sélections de produits qu’il a réalisés. C’est la mission des “frères Alzieu”, tels qu’on appelle Florent et Vincent dans le petit monde de l’affiliation. Le duo est, depuis début 2023, à la tête d’Affilizz, plateforme tout-en-un à destination des éditeurs qui désirent prendre ce virage très rémunérateur. Une suite logique à plus de 10 ans dans le secteur puisque Florent et Vincent ont fondé en 2004 les Numériques, sites de comparaison de produits high-tech et donc pionnier de la pratique, vendu à Neweb en 2014, avant de basculer dans l’escarcelle du groupe TF1 en 2018.
“C’est à partir de ce moment-là que nous avons essayé de répliquer le succès des Numériques en matière de content commerce aux autres sites du groupe, comme Gamekult ou ZDnet”, explique Vincent Alzieu. L’occasion de se rendre compte qu’il fallait peut-être repartir de zéro pour proposer une technologie adaptable aux spécificités de chacun. Chose faite après une rencontre avec Charles Besselievre, Simon Ducoulombier et Nicolas Petillon, créateurs de Gamer prices, plateforme spécialisée dans le jeux-vidéo, dont la stack technologique a été repensée pour correspondre aux exigences du plus grand nombre. “Il a fallu la reconstruire pour lui permettre de gérer plusieurs milliards d’offres versus le million qu’elle gérait jusque-là”, précise Florent Alzieu. De cette refonte est né Affilizz, début 2023, après quelques mois d’incubation au sein du start-up studio de TF1, Medialab.
“Affilizz, c’est une plateforme SaaS qui permet à un éditeur de gérer tout ce qui est lié à l’affiliation, de la production de contenus jusqu’à la facturation”
“Affilizz, c’est une plateforme SaaS qui permet à un éditeur de gérer tout ce qui est lié à l’affiliation, de la production de contenus jusqu’à la facturation”, explique Florent Alzieu. Les éditeurs peuvent depuis une seule interface s’inscrire au sein des programmes d’affiliation des principaux marchands, qu’il s’agisse de dealer avec les principales plateformes du secteur Awin (pour Fnac - Darty), Effinity (pour Boulanger - Rakuten), Tradedoubler, CJ Affiliate, Kwanko ou avec l’e-commerçant en direct, comme c’est le cas avec Amazon, LDLC ou Cdiscount.
“Nous leur donnons accès à plus de 1 300 programmes d'affiliation”, chiffre Vincent Alzieu. Une agrégation de programmes d’affiliation qui n’est pas nouvelle puisque, comme le rappelle Christophe Bosquet, co-fondateur d’Effinity, “des plateformes comme Skimlinks et Sovrn aux Etats-Unis ou Digidip en Europe se sont construits sur cette promesse, il y a une dizaine d’années pour les plus anciens.”
Mais Affilizz ce n’est pas, comme on dit dans le jargon, seulement un sub-network. C’est aussi une plateforme qui se charge de faciliter la vie des éditeurs sur bien d’autres aspects du content commerce. Prenons le sujet de l’accès au catalogue des e-commerçants. “C’est fastidieux d’importer les catalogues marchands chez soi et de s’assurer que ce que l’on affiche est à jour”, observe Vincent Alzieu. Et c’est pourtant indispensable pour ne pas provoquer un effet déceptif, en affichant une promotion qui est périmée ou un produit qui n’est plus en stock. Affilizz se charge d’automatiser cela. “On importe plus de 110 millions d’offres par jour”, chiffre Florent Alzieu. De quoi permettre à l’éditeur de s’affranchir des discrepancies qu’il peut y avoir entre ce qui est “live” chez le retailer et ce qui est remonté, avec de la latence, via le flux des plateformes d’affiliation. “Cette réactivité, c’est un vrai sujet business”, prévient Florent Alzieu.
Affilizz veut également mâcher le travail des éditeurs qui lui font confiance, en agrégeant et harmonisant les fiches produits des retailers. N’importe quel journaliste ayant déjà fait du content-to-commerce vous le confirmera (et je parle d’expérience personnelle). C’est parfois fastidieux de retrouver les références d’un même produit chez différents retailers. “Un éditeur qui se connecte au sein de notre plateforme n’a qu’à nous demander le prix de tel clavier, elle se chargera de lui fournir l’information à jour pour la totalité des marchands concernés”, promet Florent Alzieu.
Libre à l’éditeur de hiérarchiser les offres partenaires comme il le désire (par prix, commission partenaire…), en choisissant le nombre d’offres affichées et la mise en forme du rendu (liste, display…) avec choix des call-to-action (couleur, forme…) via une interface 100% no-code. Forcément séduisant pour tous ces éditeurs qui n’ont ni les ressources ou la maturité technologique des spécialistes du genre que sont CCM Benchmark, Reworld Media ou Le Parisien. Et que les 20% de commission qu’Affilizz prélève sur les montants reversés par les plateformes d’affiliation ne rebuteront pas puisque, pour pas mal d’entre eux, c’est le seul moyen de se mettre le pied à l’étrier (rappelons qu’Affilizz ne prélève aucun frais de set-up).
Affilizz revendique aujourd’hui plus de 80 clients, dont les plus connus sont Grazia, Gameblog, Marmiton, Futura Science, Wamiz ou Lesnumeriques
Lancé début 2023, Affilizz revendique aujourd’hui plus de 80 clients, dont les plus connus sont Grazia, Gameblog, Marmiton, Futura Science, Wamiz ou Lesnumeriques.com (forcément). De belles marques mais pas de “gros” poisson. Pour l’instant ? Florent Alzieu ne désespère en tout cas pas d’en convaincre de sauter le pas prochainement. Parce que ça coûte cher d’entretenir cette activité, entre la technologie qu’il faut continuellement mettre à jour et les équipes commerciales qu’il faut avoir pour piloter ça, et que si les plus grands groupes ont développé des briques technologiques propriétaires, aucun n’en a une qui gère tout de A à Z comme c’est le cas de notre solution, à en croire l’expert.
“Même les médias les plus avancés peinent à calculer un revenu généré par page, illustre Florent Alzieu. Ils savent qu’ils ont contribué à vendre tant d’iPhone mais de là à savoir comment…” En cause, leur incapacité à traquer et agréger chaque clic, comme le fait Affilizz. Et forcément problématique pour passer à la vitesse supérieure en identifiant les formats, les contextes et les audiences qui convertissent le plus. Reste à savoir si cela suffira à convaincre les plus gros, dont les revenus peuvent atteindre le million d’euros par an et pour lesquels la commission d’Affilizz représenterait (même en admettant que la commission soit revue à la baisse) au moins 100 000 euros de charges.“On peut vraiment les aider à booster le business”, promet Florent Alzieu.
Plusieurs leviers là-dessus. L’outil est capable de monitorer l’historique de vie des produits et d’alerter un éditeur sur la baisse du prix d’un produit affinitaire. “Tous les éditeurs courent après les mêmes bons plans, notre conviction, c’est qu’en réalité, tout ne marche pas pour tout le monde”, juge Vincent Alzieu. D’où l’intérêt de recouper le top des ventes de chaque marchand avec le top des ventes de chaque éditeur. Affilizz promet également de créer plus de liquidité d’inventaire. L’outil est capable d’afficher du content-to-commerce quand l’éditeur refuse les cookies de tracking et que le display classique sera donc moins rémunérateur. C’est rendu possible par l’intégration du script d’Affilizz dans le header du site. Affilizz est également capable de pousser du content-to-commerce au sein d’articles déjà existants, en analysant le contexte de la page et identifiant les contenus appropriés.
Parmi les leviers de croissance de la plateforme, il y a l’international. “Nous échangeons avec des éditeurs étrangers”, témoigne Vincent Alzieu. Il y a aussi l’influence marketing, puisque la technologie est proposée aux créateurs de contenus qui, comme Monsieur GRrr, font des partenariats sur les réseaux sociaux. Une brique d’avenir si on en croit Christophe Bosquet : “Si cela fait près de 20 ans que les bloggers, influenceurs et créateurs de contenus ont successivement dynamisé le secteur de l’affiliation, on voit qu’ils prennent, depuis quelques années, une part de plus en plus importante dans les campagnes.” Un vivier énorme que les leaders du secteur, comme Skimlinks, ont étonnamment laissé de côté.
Restent deux questions importantes. Affilizz pourrait-il profiter de la puissance de son réseau pour influer sur les taux que les plateformes reversent aux éditeurs ? Des taux qui varient selon la catégorie (2% pour le high tech, qui est très disputé, jusqu’à 15% pour le luxe-beauté) et la capacité de négociation des éditeurs (taille de l’audience et typologie). Ce ne serait pas un luxe alors que si on prend le secteur high-tech, le cœur d’expertise d’Affilizz, le marché est concentré autour de quatre acteurs - Amazon, Rakuten, Cdiscount et Fnac-Darty - et un leader, Amazon, qui contribue à lui seul à plus de 70% des revenus du secteur. C’est pourtant peu probable à en croire Florent Alzieu. “Nous ne sommes pas un sous-réseau, chaque média négocie lui-même ses taux, et pour l’instant ce n’est pas un sujet.”
L’autre sujet, c’est la présence de Reworld Media qui, suite au rachat de Unify, a récupéré un peu moins de 20% du capital d’Affilizz. Peut-on imaginer, par exemple, Prisma Media basculer sur un outil qui appartient (même minoritairement) à l’un de ses plus gros concurrents ? “Des échanges que nous avons eu jusque-là, la présence de Reworld Media n’est absolument pas un frein”, assure Vincent Alzieu. Les choses pourraient de toute façon bouger du côté du capital, alors que la start-up cherche à lever 1 million d’euros en amorçage.
Côté annonceurs, il va falloir composer avec la vague de défiance qui accompagne les sub-networks, à en croire Christophe Bosquet. “Une vraie inquiétude, côté annonceurs, c’est le manque de transparence sur le profil des éditeurs avec lesquels chacun travaille. Affilizz est mieux disant là-dessus mais cela reste un point de vigilance.” L’autre sujet, c’est l’animation du réseau. “Affilizz ne doit pas devenir un agrégateur qui impose de passer exclusivement par son outil pour collaborer avec un média. Les annonceurs ont besoin de garder un lien commercial avec leurs affiliés, pour dynamiser le marché.” Dont acte.