11 February 2025

Temps de lecture : 3 min

Claire Houry (Ventech): “L’IA dans l’adtech ouvre un terrain de jeu intéressant pour les investisseurs”

Claire Houry est General Partner chez Ventech, fonds d’investissement “early stage” créé en 1998, bien connu dans l’univers adtech. Celui-ci a notamment investi dans Webedia, StickyADS, Ogury, Adikteev ou Storetail, et plus récemment dans Olyzon et XPLN.

Historiquement, quels ont été vos investissements adtech et pourquoi vous intéressez-vous particulièrement à cette thématique ?

Claire Houry – En tant que fonds VC, nous nous intéressons aux transformations de marché, et chez Ventech, à celles portées par la technologie tout particulièrement. Notre premier investissement dans ce secteur a été Webedia, média digital monétisé par la publicité. Cela nous a naturellement conduits à nous intéresser à la data et au programmatique, notamment dans la vidéo avec StickyAds et dans le mobile avec Adikteev ou plus récemment encore avec Ogury.

Dans l’adtech comme ailleurs, notre stratégie consiste à déterminer quand les grands acteurs en place peuvent être bousculés par un plus petit, grâce à un changement technologique. Mais ce secteur nous intéresse particulièrement parce qu’il repose à la fois sur un socle technologique fort, tout en étant un marché de consolidation, avec des acteurs importants habitués à faire des acquisitions – comme Comcast, via Freewheel, pour Stickyads, dans notre portefeuille.

De fait, à partir du moment où vous avez une composante technologique forte, l’adtech offre d’ailleurs des possibilités de sorties à plusieurs stades différents, ce qui est fortement apprécié des investisseurs. Par exemple, dès que vous avez développé un produit et montré qu’il fonctionne auprès de quelques clients, vous pouvez faire une sortie assez locale, autour de 10/15 millions d’euros. Après, lorsque la société grossit, avec un positionnement européen et/ou un démarrage aux États-Unis, elle peut intéresser des acteurs plus gros. Sinon, à plus long terme, lorsque l’entreprise se positionne en consolidateur, via du M&A, elle peut intéresser les investisseurs du Private Equity. Finalement, dans tout ça, l’option de l’introduction en Bourse (IPO) à la Criteo reste une exception.

Pourtant, du côté des investisseurs, les choses ont été plutôt calmes ces dernières années…

Il y a peut-être eu un certain désintérêt des VC, car beaucoup de modèles sont restés sur des logiques d’agence, sans créer de fortes barrières technologiques à l’entrée. Le secteur a aussi été desservi par les difficultés à opérer des IPO. Car effectivement, ce n’est pas la même chose d’introduire en Bourse une adtech qu’un site e-commerce: c’est tout de suite plus difficile à expliquer.

Cependant, nous avons toujours continué à regarder ce secteur, avec deux nouveaux investissements en 2024: Olyzon dans la TV connectée, et XPLN, dans la mesure basée sur l’attention. Et nous sommes aujourd’hui toujours confiants. Dans un contexte où l’audience est très fragmentée et dans lequel le ROI pour les annonceurs est de plus en plus difficile à calculer car il y a moins de cookies disponibles, de nouvelles technologies et de nouvelles façons de faire de la publicité et de l’adtech arrivent. 

Justement, quelles sont les tendances qui devraient porter ce secteur dans les mois et années à venir ?

Beaucoup de cartes sont en train d’être rebattues par l’IA générative. Dans la création de contenus, que ce soit dans la création d’un côté ou la distribution et l’optimisation de l’autre. Le search va aussi être bouleversé. Avec des outils comme Perplexity ou AI Overview de Google, la façon dont la publicité est diffusée va changer. 

Comme nous l’a dit récemment un entrepreneur, on a connu jusqu’ici un web pour les humains, mais désormais c’est un Internet pour les robots qui est en train d’être créé. Or, ce n’est pas du tout la même chose de créer de l’engagement pour un humain ou pour un robot. Comment la publicité va s’insérer dans ce web des robots ? Quels seront les modèles publicitaires ? Toutes ces questions ouvrent un terrain de jeu intéressant pour les investisseurs !

Les startups européennes, et françaises en particulier, ont-elles vraiment leur chance ?

La tech française dans ce secteur est très bien vue par les États-Unis, qui restent évidemment le premier marché en termes de clients. L’avantage de l’adtech, c’est que le retour sur investissement est immédiat et mesurable, contrairement à d’autres secteurs du B2B SaaS où il faut attendre beaucoup plus longtemps pour voir les résultats. C’est un atout pour convaincre le marché américain: vous faites un test d’un mois sur une campagne, et si vous délivrez les résultats promis, le client continue. 

Les exemples de Teads, Criteo, Stickyads et tant d’autres montrent que les startups françaises sont crédibles en termes de produit et de technologie. Aujourd’hui, beaucoup d’entrepreneurs français de l’adtech qui ont cédé leur entreprise se relancent dans leur secteur de prédilection, c’est un vivier pour nous.

De plus, l’Europe a des spécificités fortes liées au RGPD et à la résistance à la publicité – les Allemands sont même plus stricts que nous sur ces sujets. Cela crée un contexte particulier qui pousse à développer des solutions plus efficaces avec moins de données disponibles. Il y a vraiment un modèle européen à construire sur ce terrain.

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